D’une main tremblante, le Docteur activa le scanner. Tous les yeux étaient anxieusement fixés vers l’écran. Pendant quelques secondes qui parurent durer des heures pour
les quatre voyageurs maudits, rien ne se produisit. Ian et le Docteur échangèrent un regard nerveux. Le scanner lui-même, avec sa séquence d’images, était-il tombé en panne lui aussi ?
Finalement – heureusement – l’écran sur le mur reprit vie. Une nouvelle fois, l’image des collines de Malvern apparut, accompagnée par le gazouillement des oiseaux. Le Docteur et Ian jetèrent un
regard inquiet vers Barbara et Susan près des portes. Elles s’ouvrirent lentement, et la même lumière blanche aveuglante inonda le TARDIS une fois encore. Protégeant leurs yeux, elles regardèrent
au dehors.
‘Il n’y a rien ici, grand-père, rien du tout !’ cria Susan, une pointe d’hystérie dans la voix. ‘Juste un vide béant !’
Les portes se fermèrent à nouveau. Ils levèrent tous les yeux vers l’écran. Comme ils s’y attendaient, il montrait maintenant la jungle de Quinnius. Barbara et Susan
rejoignirent les deux hommes.
‘Barbara pourrait avoir raison, Docteur, ça pourrait être une sorte de message,’ dit Ian.
‘J’ai raison !’ rétorqua Barbara. ‘Vous savez que j’ai raison. Quand le scanner nous montre une bonne image comme celle de Malvern les portes s’ouvrent parce que ça devrait être sûr pour
nous de sortir. Puis il nous montre une image horrible et les portes se ferment à nouveau.’
‘Mais si c’est un message que signifie-t-il ?’ demanda le Docteur en montrant le scanner du doigt, où l’image de Quinnius avait disparu pour faire place à la planète inconnue qui
tournoyait dans l’espace.
‘Après la Terre et Quinnius nous avons cette séquence : une planète, une planète dans un système solaire, qui s’éloigne de plus en plus, puis un flash de lumière aveuglante !’
‘Suivi d’une destruction totale,’ ajouta Barbara, détournant les yeux de l’éclat de l’écran du scanner. ‘A moins que…’ Elle attira l’attention de ses compagnons sur les doubles portes
fermées.
‘Si j’ai raison, les portes sont fermées parce que ce qui se trouve à l’extérieur pour le moment nous est hostile… Les autres images ne sont-elles que des indices ? Est-ce que cette image
que nous voyons maintenant sur le scanner nous montre ce qui se trouve hors du vaisseau ? Ca serait ça, le danger ?’
Les yeux du Docteur s’illuminèrent soudain de compréhension. Il frappa dans ses mains de satisfaction. ‘Bien sûr !’ cria-t-il triomphalement. ‘Tout est clair
maintenant : les images sur l’écran, tout ça ! c’est notre voyage –notre voyage vers la destruction !’
‘Attendez,’ dit Ian. ‘Vous voulez dire qu’on est entrain de foncer droit vers cette explosion ?’
‘Oui’, dit Barbara.’ Et le TARDIS refuse de s’autodétruire – donc le mécanisme de défense a stoppé le vaisseau et il essaye de nous avertir depuis !’
‘Exactement !’ dit le Docteur. ‘Le TARDIS sera au bout du compte incapable de résister à la puissance de l’explosion, mais il a volontairement calé dans le néant, essayant de retarder le
plus possible l’instant fatal où il sera finalement et irrévocablement détruit !’
Le tintement de confirmation qui se répercuta dans la pièce était maintenant presque assourdissant. Le sol sous leurs pieds convulsa violement, projetant les quatre
compagnons dans toutes les directions.
‘Je sais maintenant !’ hurla le Docteur, s’accrochant à la partie sûre de la console de contrôle, ‘Je sais !’ Il leur indiqua à tous l’écran du scanner : la séquence finale se
répétait encore et encore. ‘J’ai dit qu’il faudrait toute la puissance d’un système solaire entier pour vider mon vaisseau de son pouvoir. Et c’est exactement ce qui se produit ! Nous
sommes arrivés au commencement de toutes choses ! A l’extérieur du vaisseau, les atomes d’hydrogène sont entrain de se précipiter les uns vers les autres, ils fusionnent, à chaque minute
une petite collection de matière est créée. Ce processus durera plusieurs millions d’années jusqu’à former de la poussière. La poussière deviendra des entités solides – la naissance de nouveaux
soleils et de nouvelles planètes. L’ultime force de l’histoire de la création au-delà de laquelle le TARDIS ne peut se rendre !’
‘Vous ne parlez pas du Big Band ?’ demanda Barbara, incrédule.
‘Non,’ répondit le Docteur. ‘Je doute que même ma machine soit capable de rester résister comme elle l’a fait aux forces générées par la création de l’univers entier ; mais pour la
création d’une galaxie – de votre galaxie – de la Voie Lactée !’
‘Mais, Docteur, comment s’est-on retrouvé ici ?’ demanda Ian. ‘Quand nous avons quitté la planète Skaro, vous avez demandé au TARDIS de nous emmener où ?’ Le
Docteur hésita. ‘Réfléchissez, Docteur, réfléchissez !’ le pressa-t-il.
Le Docteur se figea un instant. ‘J’espérais regagner votre planète au cours du XXe siècle,’ dit le vieil homme. ‘Skaro se trouvait dans le futur et j’ai donc utilisé le bouton de Retour
Rapide.’
‘Le bouton de Retour Rapide ? Qu’est-ce que c’est ?’
‘Ca permet de faire revenir le TARDIS vers sa destination précédente, en théorie.’
‘Que voulez-vous dire, ‘en théorie ?’ demanda Barbara.
‘Je veux dire ce que je viens de dire, jeune dame !’ Cracha le Docteur. ‘Je ne l’ai jamais utilisé jusqu’à maintenant !’
‘Ne voyez-vous pas, Docteur, vous nous avez renvoyé trop loin ! Nous avons dépassé la Terre de 1963, nous avons même dépassé la préhistoire !’ Ian saisit le Docteur par les épaules.
‘Docteur, montrez-moi ce bouton ! Où est-il ?’
Le Docteur regarda la console. ‘Je ne vois presque rien avec cette lumière,’ s’énerva-t-il.
‘Il est près du bouton d’allumage du scanner,’ l’aida Susan.
‘Bien sûr !’ dit Barbara. ‘La seule partie de la console que le TARDIS a gardé sûre pour nous ! Sauf que nous avons été trop stupides pour le réaliser !’
‘Docteur, dépêchez-vous – il ne doit plus nous rester beaucoup de temps !’ rappela Ian.
‘Là ! C’est celui-là !’ dit le Docteur en indiquant un petit interrupteur carré sur le tableau.
‘Et comment ça fonctionne ?’ demanda Ian avec urgence.
‘Il suffit de le presser et –‘ le Docteur retint son souffle alors qu’il examinait l’interrupteur. ‘Il est coincé !! Je l’ai pressé et il est resté coincé !’
‘Vous voulez dire qu’il est resté coincé tout le long ?’
‘Oui, probablement.’
‘Et bien, ne restez pas planté là ! décoincez-le !’
Le Docteur sortit un petit tournevis de l’une de ses poches. Il commença à dévisser frénétiquement le panneau qui contenait l’interrupteur. Autour de lui Ian, Barbara et Susan le regardaient,
anxieux, retenant leur souffle alors que les doigts âgés du Docteur se débattaient avec le tournevis.
Il réussit finalement à ôter le panneau et commença à fouiller dans les fils et les mécanismes. Il secoua vivement avec son tournevis le bouton coincé qui se libéra
avec le « clic ! » le plus attendu de toute l’histoire.
Comme un vieil ami oublié, les lumières reprirent vie dans la salle de contrôle du TARDIS, chassant les ombres et illuminant les visages tirés quatres voyageurs temporels épuisés. Le TARDIS
reprit presque joyeusement son bourdonnement, et au centre de la console de commande le rotor temporel reprit son mouvement.
A deux doigts de l’évanouissement, Barbara se laissa tomber avec soulagement dans un fauteuil alors que Ian s’accrochait fermement au dossier.
Près de la console, Susan se jeta dans les bras de son grand-père et laissa finalement couler les larmes qu’elle retenait depuis si longtemps.
Libérés de leur terrible cauchemar, ils laissèrent échapper un profond soupir de soulagement .
Pendant un long moment personne de dit un mot.
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